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BRÈVES

Hommage à Michel Gueorguieff

 

 

"Mitch vivait à deux pas de la place de la Comédie, au coeur du Clapas, il était né là. Je n'avais jamais rencontré un type plus féru de littérature noire que lui, un érudit, un spécialiste du genre. Son appartement croulait sous les piles de polars, surtout des services de presse qui s'amoncelaient dans le couloir. Avec des copains, il avait créé une association qui organisait des cafés polar dans les bars, le principe des cafés philo mais en moins casse-bonbons. L'occasion de croiser des potos qui avaient la même passion, trinquer avec Cesare Battisti, avant qu'il n'apprenne le portugais, ou manger une paella chez Pepe Carvalho en compagnie de Thierry Jonquet. Suite au succès de ses cafés polar, Mitch avait décidé de passer à la vitesse supérieure en montant un festival international du roman noir, le premier du genre dans l'Hexagone. Après avoir proposé son projet à plusieurs communes, il avait finalement jeté son dévolu sur un bled coincé entre le Clapas et Sète. Grâce à son initiative,j'avais commencé à brasser des auteurs de polar étrangers, tels que James Crumley, qui s'était pointé au Clapas en compagnie de sa femme et de son copain Henry Joseph, un autre auteur ricain. Pour faire venir Crumley du Montana à son festival, Mitch avait manoeuvré comme un chef. L'été précédent, alors qu'il était en vacances aux Etats-Unis, mon pote avait tiré un bord jusqu'à Missoula. Après s'est renseigné pour savoir où créchait l'auteur du Canard siffleur mexicain, il avait frappé à sa porte. Crumley qui s'apprêtait à aller vider quelques chopes au bar du coin proposa alors à Mitch de l'accompagner, afin que ce dernier lui explique comment un mec pouvait venir de si loin juste pour lui proposer de participer à un festoche. A titre de comparaison, pour se rendre à un salon littéraire de l'importance du festival Etonnants voyageurs de Saint-Malo, l'agent de Crumley était contacté plus d'un an auparavant et les modalités du voyage réglées en amont très officiellement. Mais la démarche de Mitch avait séduit l'auteur de Putes. Et alors qu'ils s'étaient tous deux copieusement arsouillés au whisky et à la bière, mon pote avait obtenu l'accord de principe de l'auteur. C'était ainsi que James Crumley s'était retrouvé invité d'honneur du deuxième Festival international du roman noir de Frontignan, avec Henry Joseph dans ses bagages."

 

Serguei Dounovetz, extrait de Je me voyais déjà... (éd. Le dilettante, 2012).

 

Texte repris sur le site LR2L

Lundi 2 septembre 2013, mon ami Michel Gueorguieff (créateur du FIRN) vient de rejoindre son pote Elmore Leonard. Une page importante du roman noir se tourne.

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